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Attitude, Signalement (Heggen, Claire (1946))

Type de fiche vocabulaire* :
Signalement
Forme de l'expression :
mot
Langue de l'entrée :
Français
Classe syntaxique :
nom
Genre :
féminin
Nombre :
singulier
Usage discursif (écrit, oral etc.) :
oral ; écrit
Aire(s) géographique(s) d'usage :
Enonciateur(s) - Identités :
Type de discours :
pédagogique ; professionnel (création)
Définition :
[définition originale] L’attitude est une manière de tenir son corps dans une posture, une position. Ceci vaut pour l’acteur marionnettiste, la marionnette, et la relation des deux. Immobile, elle précède le départ du mouvement ou de l’action. Rien n’est joué. Tout est possible. Elle les conclut à l’arrivée par une immobilité. Tout est joué. La séance est close.

Si l’on s’attarde à regarder les photographies de J.C.Debureau photographié par Nadar, l’attitude est une pose tenue, une posture définie et adoptée pour donner un sens précis et identifié à l’avance (intention, émotion, état, indication, signe). Elle fait référence à un code à reconnaître et reconnu de tout le monde: surprise, écouter, souffrir, Chut !...L’attitude serait alors une « pose » expressive, dont l’objectif mimétique et signifiant se situe en fin de mouvement en le clôturant. Le spectateur est alors invité à décoder et comprendre des suites de gestes conventionnels arrêtés.

Plus tard, quand E.B.Weil photographie E.Decroux, celui-ci parle « d’un mouvement à odeur d’attitudes ». La notion d’instantané (et même de suite d’instantanés) du photographe a nourri l'acteur/mime. Il en serait de même pour l’acteur marionnettiste, ou la marionnette. L’attitude, subtilisée et fixée en image, donne à voir la forme d’un corps im/mobilisé dans son mouvement. Par la décomposition du mouvement en étapes successives dans le temps, image par image, l’attitude donne à voir des moments du mouvement invisibles normalement. Dans le vif de l’instant, syncope, suspens, fulgurance aux allures d’éternité, témoignent de l’irruption de la pensée, de l’accidentel dans la promesse de développement d’un mouvement, d’un geste ou d’une action. Symptômes d’un état de pensée, de corps, ou d’émotion, ils y sont déclinés en autant de points de vue. Bref, l’attitude est pour l’acteur, la saisie d’un saisissement, pour produire du saisissement chez le spectateur.

L’attitude a à voir aussi avec le temps de la mémoire. Un "geste fait pour durer", selon A. Artaud, renvoie à une image intemporelle qui revient sans cesse, inscrite dans les archives sensibles du corps de l’interprète. Elle questionne et interpelle la mémoire du corps du spectateur.

L’attitude préside aussi à des procédés d’écriture et de composition. Ceux-ci demandent à l’acteur de différencier des modes d’énonciation ainsi que des qualités interprétatives. Récit ? Portrait de la pensée ? Surgissement d’un préconscient de la mémoire ?

Que nous dit l’étymologie ? : Aptitudo. Actitudo.

Aptitudo. L’attitude est sœur de l’aptitude. Elles sont presque homonymes et procèdent de la même racine. L’attitude recèle en elle-même, le mystère des aptitudes, et de tous les possibles. Le sens de son immobilité, dépend de ce qui a précédé celle-ci et de ce qui vient ensuite. Ainsi, comme le bloc de marbre contient la statue encore en gestation, l’attitude est grosse de virtualités, d’un futur, de ce qui va advenir. Prégnante, enceinte, porteuse, elle est prenante.

Actitudo. Autre sœur de l’attitude. Contenant et contenance, imprégnée d’actes potentiels en attente, l’attitude est le lieu des hypothèses et du choix pour l’acteur (choix de la durée, de la fulgurance, de l’intensité, de la dimension dramatique, de la résolution, de la gestion signifiante éventuelle). Elle est une promesse faite au spectateur de l’imminence d’un acte, à se produire, et pourtant différé. Un acte immobile, qui le met en état d’expectative et d’imagination. De surprise aussi par ce qui advient et le prend à contrepied de son attente. Le suspens du geste de l’acteur alimente le suspense pour le spectateur.

La qualité et la force de l’attitude, diffèrent entre un mouvement qui s’est arrêté sur une image instantanée, imprévisible, fixée dans une instabilité étrange voire inquiétante, et une image à la stabilité rassurante décidée à l’avance. A attitudes physiques différentes, attitudes mentales et choix esthétiques différents. L’attitude suspendue est une invitation pour l’acteur à développer son aptitude à penser différemment ses actions, et pour le spectateur, à non plus décoder, mais imaginer, s’évader, broder autour, rebondir et rêver.

L’attitude est la tenue d’un corps arrêté dans une posture.

Ceci vaut pour l’acteur, la marionnette, ou la relation des deux.

La qualité et la force expressive de l’attitude, peuvent différer selon le moment du mouvement.

Si l’attitude précède le départ du mouvement ou de l’action, rien n’est encore joué. Tout est possible.

Si l’attitude se situe en fin de mouvement, elle le clôture.

Pour le spectateur la promesse de fin de mouvement se réalise sans surprise et de manière prévisible.

Par contre, si elle apparaît en cours de mouvement, de manière imprévisible, elle donne à voir un moment du mouvement invisible normalement.

C’est un arrêt sur une image fugitive, inattendue, fixée dans une instabilité étrange.

Elle révèle l’irruption accidentelle de la pensée, d’une émotion, d’un souvenir…

C’est alors qu’Etienne Decroux parlait de « mouvement à odeur d’attitude ».

La suspension du geste alimente le suspense pour le spectateur invité à imaginer et rêver.


« Un mouvement a odeur d’attitude » Etienne Decroux (Français)

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